CETTE SEMAINE, Sébastien Bazin, l'actionnaire majoritaire, annoncera une nouvelle organisation sportive au PSG. Walter Butler, propriétaire du club à hauteur de 5 %, détaille la stratégie à suivre pour, selon lui, ne plus revivre les deux terribles saisons que vient de traverser l'équipe de la capitale.
La défaite en Coupe de France est-elle grave ?
Walter Butler : Non. Je pensais à cette belle phrase d'Antoine de Saint-Exupéry : « La victoire endort un peuple, la défaite en réveille un autre. » J'espère que cette défaite, très imméritée car l'équipe a fait son meilleur match de l'année, réveillera le club afin d'éviter de revivre une telle saison.
Plus globalement, comment justement avez-vous vécu cette saison ?
W.B : Ce n'était évidemment pas une bonne année. Comme la saison précédente déjà. Le phénomène date même d'avant. Le constat est évident : s'il n'y a pas une stratégie de rupture plus profonde, les résultats resteront les mêmes. Il est anormal, avec les moyens consacrés à Paris, qu'on finisse 15e puis 16e. L'un des trois plus gros budgets d'un championnat qui se retrouve parmi les derniers au classement, il n'y a pas d'autre exemple en Europe.
Comment l'expliquez-vous ?
W.B : Il peut y avoir des aléas sportifs sur un ou deux matchs, pas sur soixante-seize. On est à la place qu'on mérite. Ceux qui pensent que, parce que nous avons gagné la Coupe de la Ligue et que nous nous sommes qualifiés en Coupe de l'UEFA, nous avons une bonne équipe, devraient être plus lucides.
Pourquoi le PSG a-t-il failli descendre en Ligue 2 ?
W.B : Le club a besoin d'une reconstruction très profonde. C'est le moment pour le faire. Le coeur d'un club de football, c'est le projet sportif qui part d'une cellule de recrutement de qualité. Il doit exister entre elle, l'entraîneur, le président et les actionnaires une étroite collaboration et unité de vue. Si cette fluidité n'existe pas, nous allons connaître à nouveau des problèmes. Le recrutement de cette saison, en particulier le mercato d'hiver, a montré à quel point les erreurs étaient possibles.
Les erreurs de casting existent dans tous les clubs…
W.B : Là, on a malheureusement été champion ! Il y a une grande différence entre Paris et Marseille. L'OM a une stratégie sportive avec une cellule qui lui a permis de détecter année après année des joueurs à fort potentiel, qu'ils soient issus du centre de formation comme Nasri ou qu'ils soient recrutés à l'extérieur pour une bouchée de pain comme Valbuena, Ribéry ou Drogba. Ribéry et Drogba ont été revendus très chers. Au PSG, on manque de constance dans les domaines de la détection depuis des années.
« Il faut dépenser mieux »
Quelle est votre part de responsabilité d'actionnaire dans l'échec des deux dernières saisons ?
W.B : Elle existe clairement, même si la stratégie qui a été suivie depuis deux ans n'est pas la mienne. Nous étions trois actionnaires à parts égales dans le PSG. Je n'étais pas demandeur de diminuer mon pourcentage dans le club, mais nous avons considéré qu'il était mieux qu'il y ait un actionnaire majoritaire.
Pourquoi avoir agi ainsi ?
W.B : J'ai voulu éviter de m'entendre dire : « C'est la faute de Walter Butler si on a des problèmes. » Nous avons donc cédé une partie de nos parts tout en restant dans le projet en tant qu'actionnaire, administrateur et potentiel repreneur du club le jour où l'actionnaire majoritaire décidera de le céder. Enfin, il faut appeler un chat un chat : les trois actionnaires étaient tout neufs dans le monde du football. On l'a payé au prix fort. Maintenant, on doit prendre les bonnes décisions pour éviter une troisième année de ce type.
Combien faut-il investir pour redresser le PSG ?
W.B : On a fini 15e puis 16e avec le 3e budget de France. Le problème n'est pas que financier. Il faut dépenser mieux, de manière plus intelligente. Des moyens, il faudra en remettre pour reconstruire. A mon sens, l'équipe doit être dotée d'une colonne vertébrale avec le recrutement de trois grands joueurs, un par ligne, avec au moins un aboyeur. Au match retour au Vélodrome (défaite 2-1), j'ai entendu un Marseillais dire : « Les Parisiens sont bons techniquement, mais il leur manque cette volonté de recoller au score quand ils sont menés. » áa m'a marqué.
Vous annoncez l'arrivée de trois grands joueurs. Or, parmi les trois actionnaires, vous passez pour celui qui refuse d'investir dans le recrutement…
W.B : Faux. Un exemple : je ne me suis jamais opposé à la venue de Claude Makelele. En revanche, je souhaite qu'on investisse dans la formation et la détection. Cela ne va pas à l'encontre de l'idée de stars. Quelques joueurs confirmés qui encadrent les jeunes, comme Clément Chantôme, c'est bien aussi. A Paris, je n'aime pas les joueurs qui se prennent pour des stars parce qu'ils sont plus payés au PSG qu'ailleurs.
Sébastien Bazin, l'actionnaire majoritaire, annoncera une nouvelle direction sportive cette semaine. Quel conseil lui donneriez-vous ?
W.B : Il ne faut pas refaire les mêmes erreurs que dans le passé parce que, cette fois-ci, l'environnement aura beaucoup plus de mal à l'accepter. Les décisions seront prises rapidement par Sébastien Bazin. J'ai confiance.